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Image de Aleksei Zaitcev

Pourquoi s'intéresser aux armes?

Mon histoire personnelle
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Il y a bientôt 15 ans, un drame est survenu. Le 13 septembre 2006 a eu un véritable impact dans ma vie, et dans celle de bien d’autres. 

 

À cette époque, j’étais étudiante au secondaire à l’École Internationale de Montréal de Westmount. Mon acolyte de l’époque et moi avions la tradition de dîner à l’extérieur de l’enceinte de l’école, comme bien d’autres étudiants, probablement histoire de ventiler un peu. 

 

Nous avions quelques endroits de prédilections : les Jardins Queen-Elizabeth, un petit parc avec quelques jeux où nous avions pris l'habitude d’aller se balancer le midi, la foire alimentaire du Complexe Alexis-Nihon, où notre occupation principale était de commenter l'apparence des passants ou encore, le fameux Subway du Westmount Square, où nous avons certainement acquis des parts de compagnie suite à nos achats quasi-quotidiens de biscuits aux noix de macadam. 

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Ce mercredi-là, il faisait beau; un gros soleil et quelque 12 degrés Celsius. Nous sommes donc parties, à 11h15, comme la tradition l’exigeait, profiter du soleil pendant l’heure et quart qui nous était alloué. Bon, je dois avouer que nous avions parfois la flemme d’assister à notre cour d’éducation physique au retour du lunch et il nous arrivait de nous éclipser pour l’après-midi (non, je n’en suis pas fière aujourd’hui!). Et si nous l’avions fait ce jour-là, personne ne sait réellement ce qui se serait passé pour nous.

 

Nous avons donc emprunté la rue Sherbrooke sur notre erre d’aller, chacune un écouteur à l’oreille, branché sur le même petit iPod shuffle vert (ces épisodes où il n’est pas question de faire deux pas sans avoir à remettre l’écouteur au creux de son oreille…).

 

Nous avons fait escale au parc histoire de se balancer un peu puis, le creux au ventre, nous sommes allées nous commander un repas McValeur au Complexe Alexis-Nihon. Pour les habitués du coin, inutile de décrire le trafic et la longueur des files d’attente qui s’y trouvent le midi!

 

Ne portant pas attention au temps qui passe, voilà qu’il faut déjà rebrousser chemin. Bahhhhh…. Pas question de se presser, c’est un cours d’éducation physique! « On aura qu’à dire au professeur qu’on attendait qu’une cabine se libère pour se changer », résonnons-nous du haut de nos 14 belles années. Excuse valable dans notre tête, nous engloutissons notre hamburger sur un banc public à l’extérieur du centre d’achat. C'est là que nous remarquons un jeune d’une vingtaine d’années, vêtu d'un trenchcoat noir, un côté de la tête rasé, marcher d’un pas décidé. Il faut dire que le Collège Dawson, réputé pour ses programmes d’arts, accueillait des étudiants au look plutôt rebelle et hors norme. Nous étions nous-mêmes à l’époque des emos (une sombre période de mon adolescence… (rires)).

Il ne faut pas pousser sa luck, comme on dit! Nous reprenons donc la route d’un pas ferme vers l’école située à une dizaine de minutes de marche. Nous empruntons, comme à l’habitude, le boulevard de Maisonneuve ouest, tournons à droite sur l’avenue Wood, puis à gauche sur la rue Sherbrooke.

Emos, diminutif de emocore, pour emotionalhardcore

 

Le style emo s’inspirait directement du gothique et du punk, mais avec une attitude un peu plus romantique. On le reconnaissait aux vêtements sombres (parfois aux motifs de léopard ou fluorescent), au toupet qui cachait la moitié du visage et au maquillage massif et charbonneux (autant chez les gars, que chez les filles). Parfois, un « coq » venait orner cette magnifique chevelure et certains jeunes hommes portaient même des pantalons achetés dans des boutiques pour adolescentes.

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Le stress monte. Nous sommes définitivement en retard. Qu’elle sera notre excuse si les portes extérieures sont fermées? Il faut dire que notre école était particulièrement stricte sur les retards sur l’heure du dîner, ça va de soi. Évidemment, mille et unes sirènes se font entendre, simplement histoire d’ajouter une couche à notre anxiété du moment!

 

Enfin arrivée à l’école, MISÈRE! Pas une seule porte de l’école n’est débarrée! Et puis bon, pas le choix! Nous sonnons au secrétariat, prêtes à recevoir une jolie convocation en retenue (dans l’inoubliable local 118, où la tendinite se faisait sentir après avoir retranscrit le programme d'éducation de l'IB au grand complet!...)

 

À notre grande surprise, mon amie et moi ne nous faisons pas réprimander pour notre retard, bien au contraire! Le cours d’éducation physique est annulé et nous devons nous rendre dans une classe qui nous est allouée à l’étage le plus rapidement possible, sans passer par nos casiers et sans prendre nos effets scolaires.

 

***

 

C’est littéralement barricadés dans nos classes, tous et toutes autour de la radio à antenne, que nous apprenons ce qui vient de se passer. Une fusillade venait d’avoir lieu à quelques centaines de mètres.

 

Les cours avaient été annulés pour le reste de l’après-midi et nous devions impérativement rester enfermés dans nos classes. Je me rappelle que les enseignants hésitaient à nous laisser aller aux toilettes. L’établissement ne laissait aucun élève quitter l’école, sans la présence de ses parents ou tuteurs légaux. À ce moment-là, les détails entraient au compte-goutte et on ne savait pas encore s’il y avait un deuxième tireur.

 

Pour les plus branchés d’entre nous, qui essayaient de rejoindre leur parent avec leur cellulaire personnel – à cette époque, les cellulaires n’étaient pas encore une extension du bras –, n’y arrivaient pas puisque le réseau était saturé à cause de la surcharge d’appels. Non seulement d’appels d’urgence, mais d’appels de proches qui essayaient de se rassurer, tant bien que mal.

 

Je me rappelle avoir quitté l’école en fin de soirée cette journée-là. Ma mère n’étant pas véhiculée à cette époque, et le métro Atwater fermé, c’est ma tante qui était venue me chercher, en pleine cohue. Le trafic était incroyable, nous avions pris 1 heure à faire la route vers la maison, celle qui nous prenait habituellement une quinzaine de minutes.

 

***

 

C’est seulement dans les semaines qui ont suivi que nous avons réalisé ce qui s’était passé ce midi-là. Nous avions croisé le coupable, nous avions emprunté sa route, nous avions contourné son véhicule stationné au coin de l’avenue Wood et du boulevard de Maisonneuve…

 

C’est seulement dans les semaines qui ont suivi que mon amie et moi avons réalisé que les multiples sirènes que nous entendions se dirigeaient exactement là d’où l’on revenait.

 

J’avais 14 ans, mais je m’en rappelle comme si c’était hier.

La fusillade au Collège Dawson

 

La fusillade au Collège Dawson a eu lieu le 13 septembre 2006. Elle fait une vingtaine de blessés, dont huit jugés dans un état critique les jours suivants. Une jeune femme de 18 ans, Anastasia De Sousa, y a perdu la vie, atteinte de neuf projectiles.

 

Hayder Kadhim, atteint de 3 balles, est un véritable miraculé. Il devra cependant vivre pour le reste de sa vie avec deux projectiles situés au niveau de son cou et de sa tête (la troisième balle étant la seule à avoir pu être extraite sans mettre sa vie en danger).

 

La fusillade a mené à l'adoption en 2007 de la « loi Anastasia », Loi visant à favoriser la protection des personnes à l’égard d’une activité impliquant des armes à feu. Depuis, les lois sur les armes à feu ont fait du chemin, dans un sens et dans un autre à l’échelle canadienne, en fonction des évènements, des gouvernements etc.

Cette petite mise en contexte explique mon intérêt pour la question des armes à feu, y ayant été confrontée plus ou moins directement, ainsi que ma motivation sous-jacente à mener à terme ce projet.

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